Trouver sa place
Debbie a passé une grande partie de ses 36 ans de carrière dans les Forces armées canadiennes (FAC) en tant que premier maître et technicienne en approvisionnement. Les services qu’elle a rendus lui procurent une grande source de fierté. En raison des rigueurs de la vie à bord d’un navire, elle a dû abandonner la vie militaire pour raisons médicales. « Il y a une limite au nombre de fois où l’on peut se cogner le genou contre des cloisons en acier avant d’éprouver une vive douleur », dit Debbie.
Mais elle n’était pas une simple leader dans sa carrière régulière. Même après avoir quitté le service militaire, Debbie a façonné l’expérience militaire de tous les Autochtones du Canada.
Dans les petits pots, les meilleurs onguents
Vous pourriez ne pas saisir sur-le-champ la force de la nature de Debbie, même si vous la rencontriez. Elle est de petite taille, son doux timbre de voix est trompeur et elle ne tarde pas à faire l’accolade à tous ceux qu’elle rencontre.
Pour beaucoup de ceux qui la connaissent, Debbie joue le rôle vital de « grand-mère » – un titre qui a une profonde connotation dans les cultures autochtones. Ce titre honorifique traduit également l’influence que Debbie a exercée sur l’ensemble des membres des FAC.
Depuis plus de deux décennies, Debbie a contribué à influencer l’armée canadienne sur les questions relatives aux Autochtones et aux droits de la personne. Elle siège à des conseils consultatifs qui conseillent les ministres et les chefs militaires.
Pour elle, cela est tout naturel, mais ce n’est pas la voie qui lui était destinée plus tôt dans sa vie ou sa carrière.
Œuvrer à améliorer la vie d’autrui
Au début de son service dans la marine, Debbie a exploré son héritage et sa spiritualité pour chercher à combler le vide dans sa vie. Mais la marine n’a pas toujours su répondre à sa quête à bras ouverts.
Souvent, je me retrouvais face à un supérieur qui me disait : « Une bonne femme indienne ne devrait-elle pas être à la maison pour s’occuper de son mari? », de déclarer Debbie. « Une de ces fois, je suis rentrée chez moi en larmes. »
Debbie affirme que sa famille a été une source de motivation qui lui a permis de persévérer. « Mon mari est mon pilier. » Il me demandait : « Pourquoi laisses-tu cette personne t’atteindre? Tu sais que tu vaux mieux que ça », dit-elle. « C’est lui qui me permet de m’ancrer et il me soutient, et il n’est pas Autochtone. À partir de ce moment-là, j’ai décidé que plus personne ne me renverrait chez moi les larmes aux yeux. Je suis devenue plus forte et je me suis portée à la défense des intérêts des membres autochtones dans les FAC. Pour les personnes qui n’avaient personne pour les guider et les encadrer et être là pour elles quand elles en avaient besoin. »
Les droits de la personne, l’œuvre de sa vie
Lorsqu’elle a découvert cette nouvelle voie en tant que mentor et porte-parole des Autochtones dans l’armée, Debbie a acquis une nouvelle énergie et un nouveau sens dans sa vie.
Grâce à une meilleure connaissance de son héritage, elle s’est rendu compte de l’importance du rôle que l’ignorance a joué dans le racisme institutionnel auquel elle a été confrontée pendant ses années de service.
« La discrimination et le racisme ne sont pas innés. Ce sont des éléments acquis, explique Debbie. Je me suis donné pour mission d’aider les gens à comprendre la culture autochtone – nos cérémonies, nos moyens de communication, nos modes de vie. »
Elle n’a pas tardé à trouver d’autres personnes qui partageaient ce point de vue, certaines occupant des postes très élevés. « Le sénateur Murray Sinclair vient en tête de liste. Il a été l’un des commissaires de la Commission de vérité et réconciliation », se souvient Debbie. Il a affirmé : « C’est l’éducation qui nous a mis dans ce pétrin et c’est elle qui nous permettra d’en sortir ».
Apprendre aux autres à accepter la diversité
Depuis des années, Debbie contribue à l’éducation des gens à tous les niveaux de l’armée canadienne. Elle fait partie du Groupe consultatif des Autochtones de la Défense, qui éclaire les commandants sur les questions touchant la vie des Autochtones travaillant au ministère de la Défense nationale et servant dans les FAC. Son travail a été indispensable pour de nombreux membres de sa communauté.
Chris Innes, autre membre autochtone de l’armée, a rencontré Debbie grâce à son travail consultatif. Il a récemment eu gain de cause à la suite d’une plainte sur les droits de la personne et il a obtenu le droit de porter une tresse traditionnelle autochtone lorsqu’il porte l’uniforme.
Chris déclare : « Je ne peux pas la décrire en un seul mot. Si vous pouvez penser à tout ce dont une communauté a besoin chez un confident, un aîné, une personne qui prépare les repas, c’est bien Debbie. C’est une camarade d’armes de longue date et c’est aussi une bonne Autochtone ».
Construire une communauté plus forte
Depuis son départ des FAC, Debbie est devenue une figure incontournable du centre d’amitié mi’kmaq d’Halifax, où elle était en poste. Elle continue d’exercer une grande influence sur les personnes de son entourage là-bas.
« Debbie déborde d’énergie », souligne Dave Ladouceur, monteur de charpentes métalliques sur les chantiers navals d’Halifax, qui vient d’être élu membre du conseil du centre d’amitié. « Elle est le maillon qui maintient le centre d’amitié en place. Si elle me demandait de déplacer des montagnes, je n’hésiterais pas à le faire. Elle est une grande source d’inspiration pour moi. Elle m’a aidé à atteindre mes objectifs et à devenir une meilleure personne ».
Debbie s’inspire du travail qu’elle a accompli dans son enseignement sur le patrimoine et la culture autochtones pour l’appliquer dans la vie après le service militaire, mais ce sont dans les FAC que sa contribution a été la plus marquante.
Et à ses yeux, les choses s’améliorent.
« Au début de ma carrière, c’était difficile, dit Debbie. Dans les dernières années de ma carrière, l’armée a accepté les peuples et la culture autochtones. Et si mes efforts pour aider les gens à comprendre qui nous sommes ont permis d’enrayer ce niveau de discrimination et d’ignorance – si je suis là pour pouvoir aider et transmettre ma culture aux gens et les éduquer – alors peut-être que je peux contribuer à faciliter la vie aux jeunes Autochtones qui s’enrôlent maintenant dans l’armée ».
Date de publication : 2021-03-01