Lorsque le soldat (à la retraite) Grace Shears a quitté l’armée en 1992, elle dit qu’elle essayait de mettre fin à une relation violente, qu’elle buvait beaucoup, que le syndrome du côlon irritable et la maladie de Crohn la faisaient souffrir et que sa santé mentale se détériorait.
La guerre du Golfe était sur le point de commencer et l’armée proposait des forfaits.
« Quand on m’a proposé une libération honorable, j’ai dit : 'oui, je sors d’ici' », a-t-elle déclaré.
« Il fallait que je parte. »
Elle souffrait et avait besoin d’aide, mais elle ne se considérait pas comme une vétérane.
« Je n’ai jamais servi outre-mer. Je faisais des tâches administratives », dit-elle.
« Je refoulais tous mes traumatismes. Je me sentais perdue. »
Son service militaire a débuté en 1989 à la BFC Cornwallis, où elle est par la suite devenue membre de l’Unité de recherche appliquée sur le personnel des Forces canadiennes à Toronto en 1990. Elle dit que son service a été entaché par du harcèlement et des abus sexuels.
« J’avais une forte poitrine, et cela a pris beaucoup de place dès le moment où je me suis présentée au bureau de recrutement, en fait, et pendant toute mon instruction de base », dit-elle.
Son alcoolisme s’est aggravé tout au long de son service militaire : « J’étais une alcoolique à part entière et il fallait que quelqu’un me transporte sur ses épaules pour me sortir de la salle à manger parce que j’étais trop ivre. »
« Je voulais être médecin ou infirmière praticienne, mais rien ne s’est passé comme je l’avais prévu. »
Trente ans plus tard, Grace dit qu’elle a finalement trouvé la paix et qu’elle aide les autres à faire la même chose.
Après avoir lutté pendant des années pour obtenir l’aide dont elle avait besoin, elle a été mise en relation avec Anciens Combattants Canada et a commencé sa réadaptation. Elle travaille toujours à sa guérison.
« Je ne sais vraiment pas où je serais si ACC n’avait pas finalement été là pour moi », dit-elle.
Elle aide les vétérans et les premiers intervenants par l’intermédiaire de sa fondation à but non lucratif – Pathways to Better Days, un groupe de soutien par les pairs sur l’ESPT qui met ses membres en lien avec des ressources et offre des services de sensibilisation au moyen de la musique.
Ses yeux bleu clair se remplissent de larmes pendant qu’elle raconte son histoire. Pour elle, c’est particulièrement important d’aider les gens à se sortir du trou noir dans lequel elle-même s’est déjà trouvée.
Même si elle a dû affronter d’importantes difficultés, elle estime que son service militaire n’a pas eu « seulement du mauvais ».
« J’ai beaucoup appris sur le travail en équipe, je suis fille unique, j’ai appris ce que c’était d’avoir des sœurs et des frères, il y a cette fraternité et cette sororité qui s’installe malgré tous les problèmes auxquels on se heurte. »
En 2019, Grace a étudié pour devenir instructrice en premiers soins psychologiques auprès de la Croix-Rouge canadienne. Le cours propose des stratégies de prévention et d’adaptation pour faire face au stress et aux traumatismes.
« J’ai vu tellement de gens souffrir… c’est ce qui m’a poussée à faire ce que je fais maintenant », dit-elle.
« Cela m’a conduite dans un endroit auquel je ne m’attendais pas. Les nuits sombres de l’âme ne sont pas finies, mais c’est un tournant complet par rapport à ce que je pensais de moi il y a 30 ans… »
« Je ne peux plus vivre dans le noir désormais, c’est trop difficile. »
Cette année, Grace s’est lancée dans la production d’une série documentaire intitulée « Finding Grace ». La série porte sur sa mission de bâtir une communauté de soutien plus forte pour ses collègues vétérans et premiers intervenants de Terre-Neuve-et-Labrador et de partout au Canada.
Tout au long de cette série, Grace et son équipe voyagent à travers Terre-Neuve pour rencontrer d’autres vétérans et premiers intervenants vivant avec des traumatismes et l’ESPT, et découvrent les outils que ces personnes courageuses ont mis au point pour s’épanouir au lieu de simplement survivre. Chaque épisode met l’accent sur l’écriture de chansons en l’honneur de leur héritage, pour mettre en lumière le parcours de guérison de l’ESPT et des traumatismes à travers le langage universel de la musique.
« Je peux partager cette aide avec les autres et voir une lumière en eux.
Il y a de la beauté à pouvoir se concentrer sur la force de quelqu’un. »