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Extraits du journal de Frank Curry

Marine royale du Canada
À bord d'une corvette en 1940

Le mardi 23 décembre -- Nous avons dû nous forcer un chemin dans une mer déchaînée. Elle nous bouscule à sa guise et nous n'y pouvons rien. D'une manière ou d'une autre, nous avons retrouvé le navire marchand à 2 h, par la nuit la plus noire et la plus tourmentée que l'on puisse imaginer, et avons réussi à le remorquer. Nous avons quitté les environs de l'île Saint-Paul pour nous diriger lentement vers Sydney. Je n'avais jamais imaginé que la mer puisse être si agitée. Les ponts de postes d'équipage sont inondés d'eau de mer froide, et tout flotte : conserves de confitures, uniformes habillés, chapeaux, biscuits, lettres et livres. Personne ne s'arrête trop pour y penser--il est plus important de survivre. Le navire a tellement roulé et tangué que nous avons tous mal aux bras, aux jambes et aux articulations; nous rêvons de quelques minutes de répit. Une fausse manoeuvre peu être fatale, surtout sur le pont supérieur. Nous sommes donc obligés d'obéir à la loi des vieux marins « une main pour le navire, une main pour soi ».

Le mercredi 24 décembre -- De peine et de misère, nous sommes arrivés dans le port de Sydney la veille de Noël, contents d'avoir accompli notre mission. Qu'il fait bon d'amarrer le navire à quai, où rien ne bouge. L'équipage s'en réjouit, et je ne fais pas exception. Après-midi de préparation et de réparations : nous avons nettoyé les ponts de postes d'équipage. J'ai fait mon quart de vigie avec le quartier-maître, de 20 h à 24 h. De la planche d'embarquement glacée, j'ai salué la Noël. J'ai fêté en prenant une douche bien chaude et en me couchant dans mon hamac à 1 h.

Le jeudi 25 décembre -- Le jour de Noël--et quelle journée! C'est mon premier Noël à bord d'un navire, mais, selon toute apparence, ce ne sera pas le dernier. Debout à 8 h (un cadeau en soi!). Nous avons nettoyé les ponts et le navire, décoré les ponts de postes d'équipage et fixé un petit arbre de Noël à la tête du mât (une autre tradition de vieux marin). Le punch qu'a préparé le « Vieux », sur le pont de postes d'équipage, m'a remonté le moral. Le dîner était merveilleux et, pour une fois, tous les officiers étaient de bonne humeur--ils étaient presque humains. Nous sommes débarqués avec un groupe de gars pour nous promener dans la ville, et visiter quelques salles de danse, mais personne n'a trop dansé.

Le vendredi 26 décembre -- De retour à la corvée habituelle. Debout à 6 h. Une brosse de peinture gelée dans la main pendant toute la matinée. Quart de vigie pendant que la plupart des gars fêtent en ville. Le navire est très tranquille (c'est très rare). Je me suis couché tôt.

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