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L'ennemi

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Moyen : Vidéo
Propriétaire : Anciens Combattants Canada et Témoignages d'honneur
Durée : 8:37
Droit d'auteur ou de reproduction

Sujets – en ordre d’intervention

  • Nicholas Dimitroff
  • Aurèle Ferlatte
  • Jacques Raymond
  • Joseph Albert Gérard Arsenault
  • Basile Rotoff
  • Gwendolene-May Carette
  • L’honorable Gilles Lamontagne
  • Edgar Doiron
  • Claude Gibson
  • André Lord
  • Maurice Audet
  • Wilson Dionne

Transcription de la vidéo

Moi je comparais les Allemands, ceux qui étaient-là au front, comme nous autres. Quand t’es forcé d’aller parce qu’il y en avait un en haut, là qui… Parce qu’il y a des enfants de quatorze ou quinze ans qui nous ont fait face, pis tout ça. Tu vois un enfant de 14 ans, là, avec un fusil, c'est triste. Fait que moi, dans mon for intérieur, je me disais : Pourquoi, pourquoi je ne l’aimerais pas lui? Pourquoi avoir de la rancune contre quelqu’un qui nous a rien fait ? Ces gens-là – je ne parle pas des hauts placés, là – les gens de notre rang, ils nous avaient rien fait.

Les travaillants avaient très peu à dire, c’était le système militaire qui contrôlait. Ce qui voulait dire que ces gars-là se battaient, il faut admettre, ils se sont battus et ils étaient très bien entraînés. Ils avaient leur cause, ils pensaient qu’ils avaient droit.

Moi, les Allemands, j’avais un grand respect pour, comme militaire, moi, même quand j’ai vu des prisonniers, des fois, en dernier, on prenait ça par deux mille, trois mille, ils se rendaient, les troupes. Mais quand on sait qu’on regarde le, le, l’être humain, là, il est dans notre âge, peut être un peu plus vieux, puis il est complètement désarmé, puis il est dans un champs, là, ils les faisaient mettre tous, des fois, tous à genoux ou assis dans des champs, ces gars-là avait des familles quand même.

Fallait comprendre que ces deux gars là auriont mieux aimé être chez eux, qu'être dans l'armée, quand même qu'ils étaient Allemands.

En '40, lorsque les Allemands sont rentrés en France. Tout l'monde avait peur, tout l'monde se cachait. Y avait des réfugiés partout, sur les routes, tout ça… Ils avaient peur parc'qu'y avait… On disait que les Allemands coupaient les seins aux femmes et des choses comme ça. Tout l'monde avait peur. Y avait des grosses histoires qu'on racontait. Au fond, quand les Allemands sont v'nus, ils étaient plus ou moins normaux, des soldats comme des soldats.

Un bout d'temps, y avait les prisonniers de guerre allemands qui étaient venus à Québec et pis ils les emmenaient sur les Plaines, pis nous, on aimait ça, on r'gardait par les fenêtres. On les voyait… Des beaux grands gars [rires] qui s'amusaient, ça courait, ça jouait à la balle…

Avec l’aviation allemande, il y avait un certain relax parce qu’on avait une certaine affinité ensemble. Tu sais, je sais pas, les aviateurs étaient ensemble. Mais quand c’était la Gestapo, là, je peux dire qu’on en mangeait une, comme on dit.

Il y avait des bons, pis des méchants Allemands. Les méchants, c’était toute la Normandie entière. Les Hitler Youth, c’était dans la chair, ici, pis il y avait les SS.

Ces gars-là, même en se rendant prisonnier, ils faisaient le salut allemand. Souvent ils se faisaient rabattre un peu, mais c’était des gars aguerris, réellement, qui avait été endoctrinés, très mauvais, eux autres, leur, leur fonction, c’était de pousser sur leurs troupes. Le gars, il aurait voulu reculer, ça a l’air, ils le tiraient. C’était des troupes d’élite, entraînées à pousser sur les gars.

Pis, j'me rappelle, y avait un p'tit Allemand, y avait à peine quinze ans – y appelaient ça les German Youth. Pis l'p'tit gars y était tout' ouvert, y avait tout' son ventre ouvert, pis là, on l'a emmené à notre chose de premiers soins. C'tait un p'tit gars d'quinze ans, pis y était pour avoir seize ans. C't effrayant… À peu près… trois ans, deux ans après… moi, j'y avais donné mon adresse, j'y avais laissé mon adresse, il m'a envoyé une carte de Noël. Trois ans après, j'pense, que c'était. Pis, j'voulais la garder en souvenir, mais j'l'ai p'us…

Si y’a une chose dont j’ai souvenance, pis j’en suis pas fier… mais encore aujourd’hui, je n’aime pas les Allemands. J’me suis jamais fait un chum d’un Allemand, pis si j’vais à quelque part pis qu’il y a quelqu’un est Allemand, je revire de bord. Parce que je les aime pas.

À Paris, j'me rappelle, dans le métro, y avait des affiches qui disaient que on a pris des otages. Alors, y avait toute une liste, des affiches jaunes et sur ces affiches, y avait le nom de tous les otages qu'ils ont pris. Alors, si quelqu'un tuait un Allemand… de la résistance… la résistance tuait un Allemand, y prenaient de ces otages et y les fusillaient. Alors y avait une affiche rouge, à côté : « Étant donné que un Allemand a été tué à ce jour-ci, nous avons pris quatre otages et les avons fusillés. » et y avait l'nom des otages fusillés.

L’Allemand qui se rend, faut que ce soit dans une période facile, parce que quand on est sur la ligne de feu, puis que deux de mes camarades, comme vous autres, vous êtes avec moi, puis un est blessé, puis l’autre s’est fait tuer, vous vous sentez un peu enragé parce que nos amis, c’est comme nos frères, à un moment donné. Un ou deux Allemands qui vont se rendre dans une période où ce que c’est que c’est très dangereux, il y a pas beaucoup de chances que les gars vivent. Ils s’en viennent, puis il y a de nos amis, il y a de nos amis ou un tel, on dit pas qui ce que c’est, il dit : « on va en prendre charge ». Comment pouvez-vous laisser vos amis sur la ligne, qui ont besoin de vous, pour aller promener deux prisonniers qui en ont tout ben tué une dizaine de vos, les vôtres ? Dans, dans ces cas-là, on les voit plus. Probablement que ça se faisait de leur côté aussi, je le sais pas, mais nous autres, c’était, c’est comme ça que ça se passe sur la ligne de feu. Si c’est pas mis dans les livres, c’est parce qu’ils sont menteurs ou ils disent pas quoi.

Moi je grimpe d’un arbre au-dessus d’la barrière et j’dis à la foule : « Nous ne tuons pas les personnes. Nous n’sommes pas en amour avec les Japonais, mais nous n’allons pas quitter… tuer un Japonais parc’que vous voulez une revanche. Vous n’aurez pas cet homme. C’t’un être vivant et c’t’un employé. Il faisait son ouvrage. C’est pas un directeur, c’est pas un gouverneur, c’est un simple employé qui fait son ouvrage. Et j’peux pas l’tuer parce que il a reçu des ordres d’être sévère ou de quoi que… Quoiqu’il fasse, il prend des ordres de… Y est pas responsable de sa conduite.

Comme être humain, j’aurais pas voulu que quelqu’un les aient tirés pour rien, quand c’était pas le temps. Mais, ils ont, ils ont subi, c’est pas eux autres comme la direction, mais ils on subi la guerre ben plus que nous autres quand même. C’est vrai qu’ils en ont tué du monde. Mais, le soldat, le soldat, c’est le soldat. Il fait qu’est-ce que le commandant puis le gouvernement lui dit de faire.

Dans le monde, vous en avez des bons, qui savent quoi faire, qui veulent pas tuer, son, son, son pareil, puis eux autres demandent la même chose pour nous autres. Alors c’est là que j’ai vu que quand même on était en guerre avec l’Allemagne, il y en avait qui étaient pas pour la guerre, mais c’était des bons, tsé.

Dans chaque être humain, il y a quelque chose de bon. Des fois, ça ne se développe pas, mais c'est là, c'est là quand même.

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