Ce mémorial a été érigé en 1924 en hommage aux citoyens de la localité morts durant les Première et Seconde Guerres mondiales et la guerre de Corée.
Historique du mémorial : 1919 La première mention d’un fonds pour la construction d’un cénotaphe, dans les journaux, remonte à l’automne 1919. Les personnes présentes souhaitaient voir débuter bientôt une campagne énergique afin de recueillir 4 000 $. Cependant, d’autres citoyens plus prudents estimaient que le vote imminent au sujet d’un hôpital de district, l’hôpital Union, était tellement important que la campagne de souscription devrait attendre après la tenue de ce vote. Des retards dans le dossier de l’hôpital ont toutefois fait traîner les choses très longtemps. Certaines personnes jugeaient donc qu’il serait plus difficile d’atteindre l’objectif si la campagne de souscription était remise à plus tard. Les gens commençaient déjà à oublier la guerre. Au début de 1923, le Free Press a publié une annonce invitant les sculpteurs et les marbriers à présenter des croquis et des maquettes de divers projets. À la même époque, de nombreuses villes de l’Ouest planifiaient la construction de cénotaphes ou en avaient déjà un. Moosomin a reçu des soumissions d’une douzaine d’entreprises intéressées, dont certaines proposaient des créations assez complexes. Le comité a porté son choix sur un monument de pierre sur lequel figureraient les noms des disparus et qui serait surmonté d’une statue de bronze représentant un soldat de la Première Guerre mondiale. Il ne restait donc plus que trois ou quatre soumissions admissibles, qui ont malheureusement toutes été perdues sauf une. J’ai cependant toujours dans mon dossier une intéressante lettre manuscrite d’un sculpteur de Californie. Le dossier comprend également plusieurs lettres de l’entreprise qui a remporté le concours, celle de Messrs. Quinn & Simpson, négociants en marbre et en granit à Portage la Prairie (Manitoba). Cette entreprise, qui avait déjà contribué à d’autres mémoriaux, avait soumis le plan no 172, qui respectait le budget de 4 000 $. L’entreprise a toutefois dû faire face à un retard imprévu lorsque les tailleurs de pierre ont constaté que la liste des héros disparus de Moosomin comptait plus de 60 noms. En se fiant à leur expérience passée, ils s’attendaient à une liste à peu près moitié moins longue. Ce nombre élevé signifiait que la pierre principale devait être plus grosse que prévu, et il a fallu quelques semaines avant d’en trouver une qui ait les caractéristiques et les dimensions requises. L’entreprise de Portage avait établi des rapports commerciaux solides avec des artisans italiens, qui avaient déjà produit de belles statues de bronze pour d’autres cénotaphes. La commande relative à la statue de Moosomin a été passée en juin 1923, et le travail du granit a débuté à peu près au même moment. Le 10 septembre, une maquette en plâtre de la statue de Moosomin (réalisée à Carrare, en Italie) avait été envoyée à la fonderie, dans la célèbre ville de Florence. Le moulage a commencé, mais le projet a été retardé par un autre contretemps. Le sculpteur, le professeur Sergio Vatteroni, a été averti du retard par H. Coe et Clerici, de Genève. À cause du retard, il a été impossible d’envoyer la boîte au Canada à bord du S.S. Titan. La statue a donc dû être expédiée à New York à bord du vapeur Colombo, ce qui a ajouté un autre délai de livraison puisqu’il a ensuite fallu l’acheminer à Montréal, puis à Moosomin. Le nouveau mémorial devait être inauguré le 11 novembre 1923, mais à cause de tous ces retards, il a fallu reporter la cérémonie à l’été 1924. 1922 À un moment où l’intérêt pour le projet diminuait et où les progrès étaient lents, le premier président, le shérif G.B. Murphy, qui avait travaillé sans relâche au projet, est décédé soudainement le 22 novembre 1922. Il a été remplacé par H. Downing, qui est demeuré à la présidence jusqu’à l’inauguration. Le shérif Murphy avait apporté une contribution majeure à Moosomin, non seulement dans le dossier du monument, mais dans d’autres domaines également, et il a été vivement regretté. L’emplacement choisi La question de l’emplacement s’est posée en juin 1923, au moment de l’appel de soumissions visant à obtenir des croquis, des plans et des maquettes pour le cénotaphe. Apparemment, le comité avait déjà demandé l’autorisation d’ériger le monument sur un terrain du CPR. La compagnie s’était empressée de répondre que d’autres avaient déjà demandé la même autorisation et qu’elle avait toujours estimé que les mémoriaux de ce genre devraient s’élever sur des terrains appartenant à la municipalité. Le 27 juin 1923, le World Spectator rapportait que, lors d’une assemblée du comité du mémorial qui avait attiré une assistance nombreuse, l’angle des rues Broadway et Carleton avait été choisi pour l’érection d’un monument à la mémoire des héros disparus de Moosomin. Le journal ajoutait que la firme de Messrs. McCurdy, McDonald, Downing, Page and Truscott avait été retenue pour ériger ce monument et pour choisir les noms devant être inscrits sur la pierre; que le monument, surmonté d’une statue de bronze, devait coûter 4 000 $; et que le responsable du projet aurait à faire sa sélection parmi une douzaine de soumissions. Même si l’emplacement choisi était à l’époque un des trous d’eau les plus profonds de la ville, il a reçu l’approbation générale, d’autant plus que la présence du central téléphonique, du bureau du cadastre et du palais de justice avait déjà amélioré le coin de rue. La première tâche consistait à remplir le trou et à couler une base de béton sous la ligne de gel. Le gouvernement de la Saskatchewan a prêté généralement les services d’un ingénieur chargé d’arpenter le terrain et d’en superviser le remplissage et la consolidation. Un autre ministère a fourni des plans de plantation pour tout le secteur. Le coût de l’aménagement paysager s’élevait à l’époque à moins de 200 $. 1924 L’apathie générale qui s’était manifestée dans les premiers temps du projet de cénotaphe a été secouée par une corvée très populaire qui a permis de remplir le site et de le mettre à niveau. Cette réussite a procuré à la communauté un fort sentiment de satisfaction. La probabilité que le monument soit prêt pour le 11 novembre 1923 était cependant très mince. En fait, c’était totalement impossible puisque des lettres qui figurent au dossier révèlent que le comité s’informait encore, en mars 1924, d’une date d’expédition. La question était posée de nouveau le 1er mai 1924. Entre temps, une commande de 229 $ était arrivée des Prairie Nurseries, à Estevan, et les petits éléments qu’elle contenait ont été plantés conformément au plan établi par l’ingénieur du gouvernement de la Saskatchewan. Le plan prévoyait l’aménagement d’un arrière-plan haut et épais afin de cacher les immeubles construits derrière le cénotaphe. C’est à peu près à ce moment-là que s’est posé le problème relatif au nombre de noms devant figurer sur la pierre. Il n’y avait tout simplement pas assez de place pour plus de 60 noms. Le comité a donc écrit à Quinn and Simpson, le 6 mai 1924 : « En réponse à votre lettre du 29, le comité, après avoir examiné la question, a décidé de ne pas changer le type de pierre choisie et préfère attendre un peu plus longtemps pour obtenir une pierre appropriée. » Ce à quoi la firme de Quinn and Simpson, négociants en marbre et granit, a répondu le 23 juin 1924 : « Nous avons reçu il y a quelques jours une lettre de la carrière au sujet de la pierre qui doit servir pour le mémorial et nous attendons maintenant de savoir si la pièce convient. La lettre du 3 juin indique que la grosse pierre vient d’arriver à la gare et que le travail va commencer. » Le 20 août 1924, le World Spectator rapportait que l’emplacement choisi pour le parc commémoratif avait été nettoyé et aménagé par des bénévoles. « Le monument est attendu cette semaine. » Cette précision révèle que le comité devait être très impatient de recevoir la caisse, après des semaines et des mois d’attente depuis le début de 1923. Des clubs en effervescence Trois semaines après l’inauguration, le club des jeunes filles avait recommencé à solliciter des fonds, non plus pour un cénotaphe, mais pour une clôture décorative à l’avant du terrain du mémorial. Le club a organisé un feu de camp et recueilli une centaine de dollars. La fanfare s’est jointe à cette activité, et de nombreux propriétaires de voitures ont assuré le transport. Le 27 octobre, le club des dames a organisé un pique-nique au lac Moosomin (sur l’ancien terrain de sports). Pour dix cents, il était possible d’acheter un pain et une saucisse. Le 3 décembre, les jeunes filles ont tenu un « bal de Cendrillon » de 20 h 30 à minuit. 1925 Le club des jeunes filles chargé de recueillir des fonds pour le mémorial a uni ses efforts à la société St. Patrick’s pour l’organisation d’un concert et d’un bal à l’occasion de la Saint-Patrick. Les prix d’entrée étaient d’un dollar pour les hommes, 50 cents pour les dames et 25 cents pour les jeunes de moins de 14 ans. La soirée, fort agréable, s’est déroulée le 17 mars à la salle de l’Opéra. En octobre 1925, les jeunes filles du club ont dit adieu à Mlle Mary Scott, transférée à Regina. Mary était membre du club depuis ses débuts et avait participé fidèlement à toutes ses activités. En 1925, les jeunes filles ont tenu un bal de l’Halloween à la salle de l’Opéra; la musique était assurée par l’orchestre des jeunes. Disparition du club de collecte de fonds En février 1926, les matériaux nécessaires à la clôture décorative du cénotaphe sont arrivés, et la clôture a été érigée. Une plaque de métal fixée sur le poteau du centre porte les mots suivants : « This fence erected by the Girls’ Monument Fund Club 1926. » (Clôture érigée grâce au club des jeunes filles chargé de la collecte de fonds pour le monument, 1926) Ce club avait joué un rôle majeur dans le projet d’érection du monument, qui s’était étiré longuement, mais qui avait finalement été couronné de succès. Le club avait été créé en octobre 1921, deux ans après la formation du comité du cénotaphe de Moosomin. (Bon nombre de ses membres venaient d’une autre organisation, le club patriotique des jeunes filles, qui avait offert une aide précieuse sur le front intérieur entre 1915 et 1918.) Le club a été dissous en février 1926, au cours d’une réunion finale visant à clore le dossier du monument. Il avait recueilli plus de 2 000 $ pour la cause. Quelques instants plus tard, les jeunes filles se sont réorganisées pour former le « Ruby Rink Club », ainsi nommé en l’honneur de la présidente du fonds de collecte de fonds pour le monument, Ruby Donald, qui quittait Moosomin. Les jeunes filles du groupe s’entendaient toutes pour dire que les capacités administratives et les efforts inlassables de Mlle Donald avaient largement contribué au succès du club. Le Ruby Rink Club a par la suite apporté une contribution précieuse à l’aménagement d’une nouvelle patinoire, dont la construction a commencé en 1926. L’inauguration Sir Frederick W.G. Haultain, lieutenant-gouverneur intérimaire de la Saskatchewan, était assisté de deux récipiendaires de la Croix de Victoria lors de l’inauguration du cénotaphe de Moosomin en 1924. Sir Frederick, qui avait joué un rôle clé dans la formation et la vie politique de la Saskatchewan, était tellement sollicité pour des cérémonies publiques que l’inauguration du mémorial de Moosomin a dû être reportée du 4 au 31 août 1924. L’histoire du cénotaphe a été jalonnée de nombreux retards. Un des plus longs retards découlait justement du terrible tribut versé par la communauté de Moosomin, qui avait perdu un nombre exceptionnel de jeunes hommes courageux pendant les quatre années de la guerre, entre 1914 et 1918. Il a fallu des semaines pour trouver une pièce de granit assez haute pour contenir la liste de ces 60 héros disparus. Les démarches en vue de l’érection d’un monument à la mémoire des morts de la Première Guerre mondiale, entreprises en 1921 et 1922, ont aussi été retardées par les efforts de financement de l’hôpital Union en 1922. Le club des jeunes filles a travaillé sans relâche pendant plus de trois ans et a recueilli plus de 1 500 $ afin de couvrir une partie des coûts du mémorial. La communauté comptait aussi un comité du cénotaphe qui s’occupait du projet. Son premier président était le shérif Murphy, mort avant d’avoir pu voir le couronnement des efforts qu’il avait orchestrés avec beaucoup de compétence. H. Downing lui a succédé à la présidence de ce comité. Une fois les fonds recueillis et le plan approuvé, l’entreprise choisie a commencé à travailler au magnifique mémorial. Quand la question de l’emplacement a été soulevée, le maire V.C. McCurdy et le conseil municipal ont offert le terrain où se trouve actuellement le cénotaphe. Il y avait cependant un problème. Le terrain n’était à ce moment-là qu’un trou profond rempli d’eau, mais le maire McCurdy, avec son énergie coutumière, a lancé un programme de travail bénévole afin de remplir le site et de le mettre en niveau. En fait, 800 chargements de terre ont dû être transportés (avec des chevaux, évidemment) et déversés sur les lieux. Lorsque le monument est arrivé, le site était prêt… mais il n’y poussait pas une seule branche ni une seule feuille. L’inauguration officielle s’est déroulée par une journée ensoleillée du mois de septembre. Trois mille personnes – la foule la plus nombreuses jamais rassemblée pour une cérémonie publique à Moosomin – ont entouré le monument couvert et la plate-forme érigée pour l’occasion. La fanfare de Moosomin s’est chargée de la musique, avec le clairon Wm. Woodhead, de Wapella. L’article de journal consacré à la cérémonie indiquait que l’inauguration s’était faite dans un climat de dignité solennelle que n’oublieraient pas de sitôt les innombrables spectateurs présents. C’est l’honorable sir Frederick Haultain, lieutenant-gouverneur intérimaire de la Saskatchewan, qui a procédé à l’inauguration du monument, accompagné de son aide de camp, le major Allard; la cérémonie était présidée par le maire V.C. McCurdy. La garde d’honneur, composée de 100 anciens militaires de la région, était commandée par un autre récipiendaire de la Croix de Victoria, Harry Mullin, originaire de Moosomin. Dans son discours à la foule, sir Frederick a souligné que, lorsqu’il était en Grande-Bretagne, un cénotaphe avait été érigé là-bas et que le soldat inconnu avait été honoré. À Moosomin, le monument inauguré en ce jour honorait des morts connus, chers à toutes les personnes présentes. « Ce splendide monument, a-t-il dit, exprime les sentiments des citoyens de la localité et du district. C’est un mémorial approprié pour ceux qui ont perdu la vie pendant la Grande Guerre et dont les corps reposent aujourd’hui dans des champs de France et de Flandre. Ils sont allés au combat parce qu’ils aimaient leur patrie, et ils ont très bien joué leur rôle. » L’orateur a aussi évoqué le travail héroïque accompli par les Canadiens dans les tranchées et il a souligné le sacrifice de nos morts glorieux. « Ces hommes, dont nous rappelons les noms aujourd’hui, font partie des braves soldats de notre Dominion grâce auxquels le nom du Canada est aujourd’hui respecté en France et en Belgique. » Le maire McCurdy a rappelé quant à lui, dans son discours, l’histoire du comité du cénotaphe et évoqué le travail magnifique du club des jeunes filles, dont la contribution de 1 500 $ représente énormément d’efforts et de sacrifices. Il a également parlé de leurs efforts constants et inspirants pour faire ajouter une clôture ornementale sur le site du monument. « Le monument est maintenant terminé, a déclaré le maire McCurdy, et il est prévu que le terrain sera planté d’arbres, de fleurs et de gazon qui en feront un endroit magnifique où les gens viendront non pas pour s’amuser, mais pour contempler tranquillement ce monument qui constituera pour tous un symbole durable de l’esprit de service et de sacrifice. Je voudrais dire aux jeunes que, dans les années à venir, quand vous assumerez les fonctions et les responsabilités de vos parents comme le veut le cours naturel des choses, c’est vous qui devrez veiller à ce que ce terrain soit toujours vert et bien entretenu et à ce que ce symbole de sacrifice soit traité avec respect. » C’est le révérend Wm. Cole, recteur de la paroisse anglicane de St. Alban’s, qui a récité la prière de dédicace au cours de la cérémonie du 31 août 1924.