Avant de se rendre en France pour y travailler comme guide étudiante, Julia Schmidt admet qu’elle ne connaissait « presque rien » de la Grande Guerre. En tant qu’étudiante en commerce à l’Université d’Ottawa, l’histoire ne figurait pas parmi les sujets de lecture obligatoires. Dans ses propres mots, Julia raconte comment son emploi de guide étudiante a été une expérience d’apprentissage en soi.
Ottawa, Ontario
Julia Schmidt à l’arbre du danger à Beaumont-Hamel en Mai, 2024.
Lorsque j’ai été embauchée comme guide étudiante, je me souviens d’avoir douté de ma capacité à représenter le Canada sur une scène aussi importante. C’était le cas jusqu’à ce que j’arrive en France et que je participe à une série de séances de formation historique approfondies.
En tant que stagiaires, nous avons visité d’innombrables lieux de sépulture et monuments commémoratifs de guerre, où nous avons appris énormément, de la planification des batailles aux types d’équipements utilisés, en passant par les histoires personnelles de soldats qui ont aimé, qui se sont battus et qui se sont sacrifiés. Mais il y a un message important que j’ai retenu de notre enseignant, le révérend major Tom Hamilton, un historien à Histoire et patrimoine au ministère de la Défense nationale. Il nous a rappelé que nous allions devenir « des gardiens et gardiennes du souvenir et les voix de héros ».
À mesure que j’ai développé des liens, ma confiance en tant que guide et mon désir de faire comprendre aux autres l’importance de notre histoire ont grandi.
Tandis que je me questionnais encore sur ma capacité à accomplir ce rôle, j’ai vite réalisé que plus je passais de temps sur les sites et plus j’écoutais les récits de batailles, plus j’éprouvais un sentiment d’appartenance à ces lieux. À mesure que j’ai développé des liens, ma confiance en tant que guide et mon désir de faire comprendre aux autres l’importance de notre histoire ont grandi. Ma mission consistait à faire en sorte que chaque visiteur quitte le site en éprouvant le même respect et la même reconnaissance que moi.
Le fait de marcher sur un sol marqué par des batailles historiques et sous un ciel où s’est déroulée une telle tragédie a été pour moi une expérience sacrée, dès ma première journée en mai et jusqu’à ma dernière journée en août. Il n’y a pas un matin où je n’ai pas ressenti le poids de tout ce qui s’est passé ici en foulant ces lieux. Je l’ai ressenti lorsque je me déplaçais sur les sites, pendant que j’effectuais des visites et lors de chaque interaction avec les visiteurs, ce qui a d’ailleurs été l’aspect le plus marquant de mon travail de guide.
Que ce soit lors d’une conversation près du monument ou en guidant des visiteurs dans les tunnels, j’étais constamment en train d’apprendre pendant mon travail. C’est une chose que de se faire raconter l’histoire d’une bataille à travers la littérature didactique, mais c’en est une autre que d’entendre des récits de première ou de seconde main de la part de vétérans ou de leurs proches.
Julia Schmidt avec Karyn Bélanger-Sherman, une ancienne guide étudiante.
En tant que guide, j’ai appris que j’avais toujours un rôle à jouer dans l’expérience d’un visiteur. Je pouvais aider à trouver une pièce manquante dans les recherches détaillées menées par quelqu’un, expliquer l’histoire complète du site à une personne qui l’entendait pour la toute première fois, ou encore écouter les histoires que les visiteurs avaient à raconter. Quel que soit le rôle que je jouais, je m’investissais tout autant afin d’enrichir l’expérience des visiteurs.
Que ce soit lors d’une conversation près du monument ou en guidant les visiteurs dans les tunnels, j’étais constamment en train d’apprendre pendant mon travail.
L’une de mes interactions préférées avec les visiteurs s’est déroulée avec une ancienne guide qui avait participé au programme en 2005. Karyn Bélanger-Sherman est revenue au Mémorial national du Canada à Vimy pour la première fois en 19 ans, accompagnée de sa famille. Alors que je guidais Karyn et sa famille au cours d’une visite, je me suis surprise à écouter ses histoires. En l’entendant évoquer avec tant d’affection son expérience de guide, j’ai compris que je n’étais pas la seule à avoir vécu une expérience aussi émouvante à Vimy. Pour elle, cette expérience demeure tout aussi significative aujourd’hui qu’à l’époque où elle portait l’uniforme de guide.
Être guide a été une expérience qui a changé ma façon de voir les choses et qui restera gravée dans ma mémoire pour le reste de ma vie. Le fait d’interagir chaque jour avec un si grand nombre de visiteurs m’a rappelé que la commémoration n’est pas liée à des conditions préalables. Que l’on soit Canadien ou non, que l’on soit déjà informé sur le sujet ou non, prendre le temps de visiter les sites et d’honorer ceux qui se sont sacrifiés pour notre liberté est la leçon d’histoire la plus enrichissante qui soit.
Julia Schmidt étudie le commerce, avec une spécialisation en comptabilité, à l’Université d’Ottawa. Originaire d’Ottawa, en Ontario, elle a travaillé au Mémorial national du Canada à Vimy et au Mémorial terre-neuvien à Beaumont-Hamel comme guide étudiante de mai à août 2024.