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Avant

Des héros se racontent

Transcription
C'était la période de la dépression. Tout l'monde n'avait pas d'argent, ma famille y compris, alors, pour gagner quelques sous, dans l'but de me distraire pendant mes vacances, je faisais d'la milice dans le corps des élèves officiers de l'Université Laval. C'était quelque chose d'assez spécial. On était obligé d'être habillé avec des uniformes de la Première Guerre, que l'quartier-maître sortait des boules à mites, c'qui voulait dire, comprenez-vous, ces uniformes-là sentaient la naphtaline comme c'est pas possible. On avait les carabines qu'avaient été mises au rancart au moment d'la Première Guerre parce qu'elles n'étaient pas utilisables, qui était la carabine Ross, ç'avait été tout un scandale au moment d'la Première Guerre. Alors, c't'avec ces carabines-là qu'on s'entraînait. Remarquez, on ne nous fournissait pas aucune munition, mais on nous fournissait des baïonnettes. On nous entraînait pour devenir de bons officiers, pouvoir nous battre, enfin, contre les forces allemandes, qui étaient en voie de s'préparer à faire la guerre, paraît-il du moins, avec un entraînement à la baïonnette. Alors c'tait pas nécessairement c'qu'il y avait de plus constructif et de plus intelligent. Ça nous donnait, ça, à peu près 70 sous par jour d'entraînement. Mais l'avantage de cet entraînement-là, c'est qu'ça nous enseignait un peu l'histoire d'la guerre, c'qui c'était passé au moment d'la Première Guerre, ça nous donnait un peu l'sens de la discipline. Et j'ai jamais regretté cet entraînement. Chose intéressante, à c'moment là, l'un de mes instructeurs était un sergent nouvellement gradué de l'école des sergents, laquelle se trouvait dans l'temps à Trenton. Et son nom était Paul-Émile Triquet et il était enrôlé dans l'armée permanente, il avait réussi, enfin, à se qualifier pour être accepté dans l'armée permanente, parce qu'on n'acceptait pas tout l'monde dans l'armée permanente dans l'temps, parce qu'y'avait pas d'argent pour payer les gens. Mais ce monsieur Triquet, qui a été celui qui m'a enseigné, enfin, les éléments de la science militaire, éventuellement est devenu le célèbre Paul Triquet, gagnant de la Croix de Victoria en Italie comme membre actif du Royal 22e Régiment. Un autre de mes instructeurs, qui était un gradué du collège militaire royal de Kingston, était le lieutenant Paul-Émile Bernatchez, qui lui-même est devenu plus tard le général Bernatchez, enfin, gagnant d'la DSO, de l'Ordre du service distingué, qui est devenu l'un d'mes amis et qui fut certainement l'un des soldats les plus distingués de l'armée canadienne. C'qui s'passait en Italie était assez populaire au Québec, parce que M. Mussolini et son gouvernement faisaient des choses qui mettaient les gens au travail. Étant donné qu'on était en période de chômage au Québec, on était porté à trouver que c'que faisait M. Mussolini était intelligent. En plus, Mussolini était assez sagace, ou assez intelligent, pour ne pas s'mettre en conflit avec le pape, qui était excessivement populaire dans l'Québec catholique du temps. Alors, on était porté à penser que de favoriser c'que faisait M. Mussolini n'était pas si bête. Par contre, on comprenait mal c'qui s'passait en Allemagne. Et de toute façon, c'qui s'passait en Allemagne était à peu près inconnu du Québec du temps et y'avait pas tellement d'publicité venant en Amérique au sujet de c'qui s'passait en Allemagne. Comme par exemple, le traitement qu'infligeaient M. Hitler et son parti nazi socialiste, qui montaient en ampleur, contre les juifs, était quelque chose qui était peu connu. Et de toute façon, les juifs au Québec, dans l'temps, comme au Canada d'ailleurs, n'étaient pas tellement populaires eux non plus. L'antisémitisme, vous savez, ça j'en parle, parce qu'enfin, je crois que c'est important qu'ce soit su, c'est pas quelque chose, ça, savez-vous, qui était limité à l'Europe du temps, c'est quelque chose qui était mondial. C'était quelque chose de déplorable, j'le déplore encore, mais ça existait. Puis..., de toute façon, l'ampleur des crimes et du génocide qu'avait commencés M. Hitler n'était pas connue. Dans l'temps, c'était peu connu. Mais, chose certaine, c'est que même si c'que faisait M. Mussolini n'était pas tellement impopulaire, c'que faisait M. Hitler était peu connu et le fait qu'il semblait vouloir se préparer pour la guerre faisait peur aux gens, parce qu'il y avait énormément de gens qui se souvenaient des massacres épouvantables et des hécatombes d'la Première Guerre et qui voulaient pas que l'histoire se répète. Mais, y'avait pas grand-chose qu'on pouvait y faire, de toute façon. Puis, il faut se souvenir que le Canada du temps n'était pas comme le Canada d'aujourd'hui. Que, par exemple, on n'avait pas des nouvelles aussi fertiles qu'on peut les avoir aujourd'hui. Les nouvelles... la radio était, commençait dans l'temps, la télévision n'existait pas. Et les nouvelles qui v'naient et qui étaient publiées dans les journaux étaient transmises aux journaux par la presse canadienne, qui elle-même les recevait souvent en retard de la presse associée, enfin, c'tait un peu plus compliqué que ça ne l'est aujourd'hui. Mais, chose certaine, c'est qu'on sentait que la guerre menaçait. M. Mackenzie King, qui était un sage, et qui, selon moi, vu qu'on parle d'histoire dans l'moment, je crois que ç'a été probablement le plus grand premier ministre du Canada et celui dont nous avions besoin dans l'moment, parce que c'était un homme qui était très... qui avait beaucoup d'jugement et qui a décidé de tenir le Canada uni quoi qu'il arrive, durant les jours tragiques de cette guerre, et qui a toujours résisté à ceux qui étaient plus ou moins extrémistes dans leur manière de voir et d'penser. Et je crois que nous avons été chanceux, au Canada, d'avoir M. Mackenzie King comme premier ministre à cette période. Ceci peut peut-être surprendre quelques-uns qui vont m'écouter, qui savent que j'ai été d'allégeance conservatrice, mais il faut tout d'même être logique et il faut tout d'même être juste dans son opinion des hommes et des choses, particulièrement de nos chefs, et je crois qu'il est juste de dire que M. Mackenzie King a été un grand premier ministre. Alors, un peu pour rallier tout l'monde, dans son discours pour annoncer que le Canada se joindrait aux mères patries dans leur lutte contre une Allemagne envahissante et en réalité assez... qui n'hésitait pas à trahir la parole donnée, il a laissé entendre que la guerre serait un effort modéré. Que le Canada serait l'arsenal des démocraties, ce qui, remarquez, faisait l'affaire de tout l'monde qui désirait d'l'emploi, qui désirait, comprenez-vous, que les usines s'ouvrent et que les affaires aillent bien. Mais assez intelligemment, il avait dit : « Maintenant, ceux qui voudront s'enrôler dans les forces armées seront libres de l'faire, par contre, il n'y aura pas d'conscription. » Et, c'est seulement ceux qui désireront s'enrôler pour service, là où l'devoir les appellera à travers le monde, si vous voulez, seulement les volontaires qui, évidemment, devront suivre et respecter la parole donnée, mais personne ne va obliger les autres. Alors, ceci a satisfait tout l'monde : ceux qui voulaient aller s'battre à tout prix, ceux qui voulaient travailler, ceux qui voulaient qu'l'économie revienne, parce qu'on était, enfin, encore à la fin de c'qu'avait été une dépression terrible et la dépression existait encore. C'est sûr qu'les salaires n'étaient pas élevés dans l'temps. Et... alors, le Canada ainsi était en guerre.
Description

M. Sévigny parle de son cheminement de vie avant la guerre, de ce qui se passait au Québec dans les années d'avant la guerre ainsi que la perception des Québécois au sujet de la guerre.

Pierre Sévigny

Pierre Sévigny est né à Québec le 12 septembre 1917. Au moment de sa naissance, son père est Ministre du Cabinet du gouvernement Borden. Son père fut aussi juge en chef de la province de Québec. Sa famille avait une résidence à Malbaie où il passait ses étés d’enfance.

Durant la Dépression, pour se distraire et pour des raisons financières, il est élève officier de milice à l’Université Laval. À l’age d’environ 21 ans, il se rend à Quebec afin de s’inscrire dans l’aviation. Monsieur Sévigny est refusé parce qu’il souffre de migraines. Il est aussi refusé par la marine pour la même raison. Il retourne donc au corps des élèves officiers de l’Université Laval où il est déjà qualifié comme lieutenant et continue ses études pour devenir capitaine. Finalement, il se porte volontaire dans l’armée. Il suit une partie de ses instructions à Brockville ainsi qu’à Trenton en Ontario.

Le 10 juillet 1942, Monsieur Sévigny débarque en Normandie. Il participe à plusieurs batailles qui le mèneront jusqu’en Allemagne où il fut gravement blessé par des éclats d’obus qui causera l’emputation d’une de ses jambes. Il fut soigné en Angleterre et par la suite au Canada.

Après son service militaire, il devenu vice-président de la Chambre des communes, ministre associé de la Défense nationale et ministre de la Défense nationale. Il a aussi été professeur pendant 20 ans. Monsieur Sévigny a également été reçu comme officier de l’Ordre du Canada. Au moment de l’entrevue, il demeurait à Montréal avec son épouse.

Catégories
Médium :
Vidéo
Propriétaire :
Anciens Combattants Canada
Durée :
09:10
Personne interviewée :
Pierre Sévigny
Guerre ou mission :
Seconde Guerre mondiale
Campagne :
La bataille de Normandie
Branche :
Armée
Occupation :
Officier d'artillerie

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