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Vivre avec sa colère

La force francophone

Vivre avec sa colère

Transcription
VIVRE AVEC SA COLÈRE Ça, c'est quand j'ai traversé la rivière à Nijmegen. Ça, c'est dans la semaine de Noël. Et puis il fallait que j'aille, on avait les premiers tape recorder puis c'est moi qui l'avais sur le dos puis ma job, c'était de monter dans les poteaux puis splicer les fils puis enregistrer la conversation allemande. On faisait ça la nuit. Puis quand on est revenus, la cinquième fois quand je suis revenu, les Allemands étaient là, pas loin, puis ils nous ont vu courir puis enlever le camouflage de nos bateaux de rubber puis envoye à l'eau. Mais ils ont tiré puis les quatre gars qui étaient avec moi se sont fait tuer puis moi j'ai sauté. Dans la semaine de Noël! Puis l'eau est froide, froide, froide, froide. Et c'est les Américains qui m'ont ramassé l'autre bord de la rivière. Je n'avais plus de linge, j’avais rien que… même pas mes culottes mes bottines je les avais enlevées en-dessous de l'eau, mon casque de fer, tout le pack, tout, jacket, tout. Ils m'ont ramassé puis ils m'ont emmené à l'hôpital. J'avais mes dog tag, dog tag on en a deux, fait qu'ils en ont pris un puis ils l'ont envoyé à l'armée canadienne et le major est venu me chercher, ça a pris une semaine pour qu'il me retrouve. Et les autres étaient morts. Le bateau a coulé, le bateau de rubber a coulé. Les balles, on entendait les balles allemandes rentrer, tchouk, tchouk, tchouk, comme ça. Puis j'ai été correct, aucune blessure apparente. Mais j'étais mauvais quand je suis revenu chez nous. Eh saint… Je partais le vendredi, là, puis il fallait que je me défoule de ma méchanceté, comprends-tu. Je montais à Ottawa House, au coin de la rue Eddy puis Principale c'est un building du gouvernement qu'il y a là, et j'allais vider la place, tous les vendredis. Pour me guérir de ça, mon père a écrit à mon oncle Moïse qui avait une ferme à (inaudible). Ma tante, c'est une Indienne, fait que quand je suis arrivé, moi, fallait qu'ils viennent me chercher à Maniwaki, le train n'allait pas plus loin que Maniwaki. On avait dix milles à faire en charrette. Puis quand ma femme m'a vu arriver elle a allumé le feu, elle avait fait un feu, un cercle, puis elle dansait puis elle s'aspergeait avec une plume une grosse plume longue de même. Ça avait dû être une oie ou quelque chose. Elle s'envoyait la fumée sur elle. Et elle me dit : Roger, rentre puis danse avec moi. Ça fait que j’ai commencé à danser,parce que j'avais appris ça quand j'étais jeune. Puis elle m'aspergeait, elle m'aspergeait. Finalement, au bout de 15 minutes elle a arrêté et elle a dit : Viens manger astheure. On a été manger. Et puis le lendemain matin, mon oncle Moïse m'attendait avec deux chevaux de selle puis une jument pour charrier le bagage puis il m'a emmené à peu près comme 20 milles de chez lui à travers le plein bois, là, dans le parc de la Vérendrye. J'avais un couteau, une fourchette, une cuillère à soupe puis une cuillère à thé, puis j'avais du sucre puis j'avais du thé et puis j'avais des allumettes, j'avais des cigarettes et puis j'avais une ligne avec trois, quatre hameçons. Le lac qu'il y avait là, c'était un lac à truites rouges et puis j'avais la carabine, une .22. Puis quand je voulais manger je me tuais une perdrix, un écureuil ou bien j'allais chasser un lièvre. Puis là j'ai bien dormi, comprends-tu, je dormais paisible, là. Il n'y avait rien pour m'achaler, rien, rien, rien, pas de lecture, pas de télévision, pas de radio, il n'y avait rien, en plein bois. Je vivais la vie des Indiens. Puis j'ai pris le train à peu près une semaine après puis j’ai descendu. Quand mon père et ma mère m'ont vu arriver, j'avais le visage souriant puis ça ne me tentait plus de me battre, ça ne me disait rien de me battre. Pourquoi me battre puis blesser quelqu'un, tu sais? Et là, j'ai jamais frappé quelqu'un depuis ce temps-là, jamais.
Description

De retour au pays, Roger Charbonneau raconte comment il a réussi à se débarrasser de sa rage et de sa colère.

Roger Charbonneau

Roger Charbonneau est né à Hull. Au printemps 1941, il s’enrôle dans l’Armée canadienne. Son instruction militaire a lieu à Ottawa, puis son cours de signaleur à Kingston. Il s’en ira par la suite combattre en Europe. Il participera à plusieurs missions périlleuses, notamment toute la campagne de Normandie et une mission à Nijmegen (Hollande) où quatre de ses coéquipiers perdront la vie.

Catégories
Médium :
Vidéo
Propriétaire :
Anciens Combattants Canada
Durée :
4:05
Personne interviewée :
Roger Charbonneau
Guerre ou mission :
Seconde Guerre mondiale
Emplacement géographique :
Canada
Branche :
Armée
Unité ou navire :
21st Army Group

Droit d’auteur ou de reproduction

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