Alfred Babin

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Table des matières

Enrôlement

en 1939

Affectations

  • Terre-Neuve
  • Hong Kong
  • Corée
  • Allemagne (Soest)

Déploiements

  • Seconde Guerre mondiale
  • Guerre de Corée

Alfred Babin

Hommage d’un fils à l’occasion du 80e anniversaire de la Victoire sur le Japon

Toronto (Ontario)

Avertissement : Ce contenu traite de sujets explicites qui pourraient troubler certaines personnes. Nous recommandons aux lecteurs de faire preuve de discernement.

Introduction

À l’occasion du 80e anniversaire du jour de la Victoire sur le Japon, les Canadiens et Canadiennes sont invités à réfléchir au sacrifice et à l’endurance de ceux et celles qui ont vécu l’un des chapitres les moins connus de la Seconde Guerre mondiale. Si beaucoup se souviennent des batailles en Europe ou des bombardements atomiques qui ont mis fin à la guerre, c’est la bataille de Hong Kong qui a fait d’Alfred Babin un soldat capable de survivre à des circonstances inimaginables.

Une résilience forgée en captivité

Alfred Babin au Canada en 1941.

À l’automne 1941, Carabinier Alfred Babin a été appelé à défendre la colonie britannique de Hong Kong. En l’espace de quelques semaines seulement, il a été capturé par les soldats japonais. Bien qu’il ait été prisonnier de guerre pendant près de quatre ans, il parlait rarement des moments sombres qu’il avait endurés.

Alfred Babin est décédé en 2014, mais son héritage perdure grâce à son fils, Michael, qui se consacre à préserver la mémoire de la première bataille terrestre du Canada pendant la Seconde Guerre mondiale.

« Il ne cherchait pas à être un héros, il avait seulement besoin d’un travail. »
 

Le Canada entre dans la Seconde Guerre mondiale

Alfred Babin et Christina Crowell avant son déploiement à Hong Kong.

Né en 1921 à Moncton, au Nouveau-Brunswick, pour ensuite aller s’établir à Sydney, en Nouvelle-Écosse, Alfred Babin s’est enrôlé dans l’armée en 1939, un jour avant que la Grande‑Bretagne ne déclare la guerre à l’Allemagne. « Il ne cherchait pas à être un héros », explique Michael. « Il avait seulement besoin d’un travail. »

En 1940, Alfred Babin a rencontré Christina Crowell, une collègue des Forces armées canadiennes originaire de Windsor, en Nouvelle-Écosse. Ils venaient à peine de commencer à se fréquenter quand Alfred Babin est parti en déploiement. Il a pris place à bord d’un train à Valcartier, au Québec, sans connaître sa destination. Lorsqu’il a constaté que le train roulait vers l’ouest, il a réalisé qu’il ne partait pas pour l’Europe. Après leur arrivée à Vancouver, les troupes se sont embarquées pour Hong Kong, où elles ont rejoint la garnison britannique chargée de défendre la colonie.

Le paysage, le climat et la culture inconnus ont frappé ce jeune homme issu d’une famille francophone des Maritimes. En quelques semaines, il est passé de l’entraînement dans la campagne montagneuse à la guerre.

La bataille de Hong Kong

Alfred Babin (à gauche) lors d’une inspection avec le feld‑maréchal britannique Bernard Law Montgomery.

Le 8 décembre 1941, quelques heures après l’attaque de Pearl Harbor, le Japon a attaqué Hong Kong. Alfred Babin, un musicien de formation au sein du Royal Rifles, a été affecté au service ambulancier. « Mon père n’avait jamais conduit », explique Michael. « Mais ils manquaient d’ambulanciers... Il a donc très vite appris tout seul à conduire. »

Alfred Babin a affronté le danger sur les lignes de front, où il rescapait les blessés sur les champs de bataille pour les transporter au St. Stephen’s College, qui avait été transformé en hôpital.

Le 25 décembre, les forces japonaises ont pris d’assaut l’hôpital, ce qui a donné lieu à un massacre. Enfermé dans une pièce avec d’autres personnes, Alfred Babin entendait les cris de ses camarades. Une fois libéré, il a reçu l’ordre d’aider à brûler les corps des personnes tuées.

« Il avait tendance à voir le bon côté des choses, et je pense que c’est ce qui lui a permis de survivre à la guerre. »

Trois ans et huit mois

Parmi les 1 975 soldats canadiens qui ont participé à la bataille de Hong Kong , dont deux infirmières et de nombreux soldats autochtones, 1 685 ont été faits prisonniers de guerre. Alfred Babin a passé les 44 mois suivants en captivité, d’abord à Hong Kong, puis au Japon. Jour après jour, les prisonniers de guerre étaient réveillés tôt, parfois au son des tambours, pour ensuite être conduits vers les chantiers. Alfred Babin a enduré la famine, les travaux forcés et la brutalité. Il a pelleté du charbon, il a dépéri à force de ne manger que du riz et de boire du thé, et il a même mangé une écorce d’orange jetée par terre, son seul fruit en plusieurs années.

« Il ne se plaignait jamais », se souvient Michael. « Il avait tendance à voir le bon côté des choses, et je pense que c’est ce qui lui a permis de survivre à la guerre. » L’idée que quelqu’un l’attendait l’a également aidé à tenir bon. Alfred Babin écrivait des lettres à Christina Crowell, sans savoir si elles lui parviendraient un jour. « C’était une motivation très forte pour lui de rester en vie », explique Michael.

Des civils japonais essayaient de passer de la nourriture aux prisonniers, « au risque d’être battus ou tués ».

Alfred Babin parlait rarement des sévices ou de la famine infligés par l’armée japonaise, mais il se souvenait de moments de compassion. « Certains civils japonais faisaient preuve de gentillesse, raconte Michael. Ils essayaient de leur passer de la nourriture sous la clôture, au risque d’être battus ou tués. »

« Il savait que la guerre touchait à sa fin et avait peut-être besoin de se libérer d’un poids. »

En juillet 1945, un Japonais aisé a invité Alfred Babin et d’autres prisonniers de guerre chez lui. « Il voulait simplement leur parler », explique Michael, qui ne sait toujours pas qui était cet homme. « Il savait que la guerre touchait à sa fin et avait peut-être besoin de se libérer d’un poids ». Quelques semaines plus tard, le 15 août, les prisonniers de guerre se sont réveillés dans le silence.

Pas de tambours, pas d’appel pour se rendre au camp de travail; les gardes avaient disparu et la porte était ouverte. Bien qu’ils aient entendu des rumeurs après le largage des bombes atomiques, Michael se rappelle que son père disait qu’ils n’y croyaient pas au début. Ils pensaient que c’était un piège. Mais c’était vrai : le Japon avait capitulé. La guerre était terminée.

Un soldat rentre chez lui

Alfred Babin avec sa femme, Christina, et leurs enfants, Michael (à gauche) et Paul (à droite).

Pendant ce temps, en Nouvelle-Écosse, Christina l’avait effectivement attendu le retour d’Alfred. Bien que ses lettres ne se soient jamais rendues à destination, un télégramme avait informé Christina et les parents d’Alfred de sa capture. Tragiquement, ses parents sont décédés avant son retour. Alfred et Christina se sont mariés peu après et ont eu deux fils, Michael et Paul.

Il a continué par la suite à servir dans l’armée, notamment pendant la guerre de Corée. Il a pris sa retraite en 1971 après plus de 30 ans de service. Bien qu’il n’ait jamais beaucoup parlé de son expérience pendant la guerre, il se recueillait chaque année en silence le 11 novembre.

Son fils Michael, aujourd’hui âgé de 76 ans, perpétue cet héritage. Après une carrière dans le domaine des technologies, il s’est joint à l’Association commémorative des anciens combattants de Hong Kong, dont il est devenu plus tard le président. Cette organisation s’efforce de sensibiliser les Canadiens à la bataille de Hong Kong et à ses survivants au moyen de matériel éducatif, d’une base de données consultable et de projets visant à rendre hommage aux soldats autochtones.

Souligner 80 ans de liberté

Pour Michael, l’anniversaire du jour de la Victoire sur le Japon est plus qu’une simple commémoration. C’est une occasion de préserver la mémoire et de reconnecter des familles grâce à des histoires inédites. En 2025, l’anniversaire revêt une signification particulière, puisque cela fait 80 ans que la guerre a pris fin, que les prisonniers de guerre ont été libérés et que les retrouvailles avec les familles ont commencé.

Les vétérans qui ont survécu à des épreuves difficiles, comme celles auxquelles Alfred Babin a fait face, n’en ont souvent jamais parlé. Certains de leurs enfants et petits-enfants ne découvrent que maintenant ce qui s’est réellement passé. C’est une occasion d’établir des liens entre ces histoires.

Alfred Babin a vécu jusqu’à l’âge de 92 ans et est décédé le 12 juillet 2014, un mois après Christina. Avec courage, intégrité et loyauté, Alfred Babin a laissé sa marque.

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