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Noël à Ortona

En décembre 1943, les Alliés avaient atteint le port maritime historique d’Ortona sur la côte italienne de l’Adriatique. Les parachutistes d’élite d’Hitler occupaient la ville. Il leur avait personnellement ordonné de la défendre à tout prix. Les troupes canadiennes étaient surtout composées de jeunes volontaires dans la vingtaine, heureux de libérer des villes dans leur avance rapide le long de la côte orientale de l’Italie. Les troupes canadiennes rencontrèrent les Allemands sur le fleuve Moro, à moins de sept kilomètres d’Ortona. Ils s’attendaient à un jour de combat, tout au plus. Les Canadiens ont plutôt été contraints de se battre pendant huit journées sanglantes pour entrer dans la ville.

La bataille d’Ortona commença le 20 décembre. Ce mois de décembre fut le plus humide jamais enregistré. Le fleuve Moro était en crue de plus de huit pieds au-dessus de son niveau normal et les champs qui l’entouraient devinrent des mers de boue qui collait aux soldats alors qu’ils essayaient d’avancer malgré les tirs embusqués, les mortiers, l’artillerie et les blindés. Les Allemands ont contre-attaqué à plusieurs reprises et la lutte était souvent au corps à corps alors que les Canadiens progressaient lentement vers Ortona. Ce que les Canadiens ignoraient, c’est qu’ils étaient sur le point de se heurter à une ligne de défense allemande que ceux-ci appelaient leur « winter liene » ou ligne d’hiver.

Les rues d’Ortona étaient étroites et bordées de maisons de pierres. Les Allemands avaient bloqué les rues secondaires, contraignant ainsi les Canadiens à passer par la seule rue assez large pour les blindés, une route importante qui traversait le centre d’Ortona. On avait fait sauter des édifices, empilant des débris qui constituaient de réels obstacles pour les blindés. C’était un piège. Alors que les chars Sherman canadiens avançaient dans la rue, on les fit sauter. Des enchevêtrements de mines et de pièges étaient disséminés dans les ruines. Des tireurs embusqués et des mitrailleurs se trouvaient à des points stratégiques un peu partout dans la ville. Il a fallu se battre pour chaque édifice de chaque rue, pour chaque pâté de maisons dans tous les coins de la ville.

L’ennemi utilisa tous les trucs et toutes ses armes. Il avait placé de l’artillerie lourde dans les ruines des édifices pour couvrir les fantassins allemands. Les caves étaient bourrées d’explosifs que les ingénieurs allemands pouvaient détoner à distance. Les Allemands avaient fait sauter un bâtiment rempli de Canadiens. Le seul survivant, un soldat du Loyal Edmonton Regiment, fut retiré des ruines trois jours plus tard.

Les rues étaient des zones mortelles. Pour se protéger des tireurs embusqués, les Canadiens eurent recours, avec succès, à une technique dite des « trous de souris ». Il s’agissait de mouler une charge de démolition dans un explosif plastique que l’on plaçait ensuite contre la cloison intérieure d’une maison. Les soldats faisaient alors sauter un orifice à travers le mur, ce qui leur permettait de progresser à l’intérieur d’édifices adjacents sans s’exposer dans la rue. Les Canadiens utilisèrent cette technique pour passer de maison en maison, éliminant l’ennemi une pièce à la fois. Parfois, ils réussissaient à libérer tout un pâté de maisons sans mettre le pied dans la rue. La technique, si réussie à Ortona, est encore utilisée aujourd’hui dans les combats urbains.

Le 25 décembre 1943, c’était Noël à Ortona. Dans une église détruite par les bombes à Santa Maria di Constantinopoli, les militaires du Seaforth Highlanders se réunirent, par quarts de veille, pour un dîner de Noël à quelques pâtés de maisons des combats. Ils réussirent à trouver les éléments essentiels de ce repas particulier – nappes, porcelaine, bière, vin, porc rôti, compote de pommes, choux-fleurs, purée de pommes de terre, sauce, chocolats, oranges, noix et cigarettes. Un organiste interpréta Sainte Nuit et, pendant quelques instants, la vie parut normale quand les soldats chantèrent ces mots au cœur de la guerre. Mais ils devaient retourner au combat. Pour certains d’entre eux, ce repas fut leur dernier.

Les Allemands se retirèrent deux jours après Noël. Les Canadiens atteignirent leur objectif, mais à quel prix! Ortona était libérée, mettant ainsi fin au mois qui passerait à l’histoire comme le « décembre sanglant ». Ce fut le mois de guerre le plus sanglant de la campagne d'Italie et 213 Canadiens périrent en cette seule semaine de Noël. Les Canadiens payèrent un prix très élevé pendant ce Noël en enfer. Les pertes subies par les Canadiens à Ortona représentaient presque le quart de leurs pertes totales pendant toute la campagne d'Italie.

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